GOODBYE MARTY
You all sat
idly by and stared.
If you were forced to eat your own blood
If you were forced to eat your own blood
Would you have cared?*
Willa Wood couru après le ballon
rouge qui s’était arrêté en plein milieu de la route, agitant ses belles boucles
blondes sur ses épaules. Marty, la border collie de Sam Smith, allongée à
l’ombre d’un grand chêne de l’autre côté de la route, en face de la ferme des
Wood, dressa la tête et les oreilles, intriguée par les rires de la fillette
courant après le ballon. Une action qui se reflétait dans les yeux attentifs de
la chienne, bercée jusque-là au seul son des chants de grillons et autres
cigales. Elle pressentit immédiatement un sentiment de danger irradiant dans
tous ses muscles et ses os. Elle se dressa brusquement sur ses pattes et bondit
dans la direction de la route. Sam Smith revenait de sa propre ferme, une glace
à la main qu’il savourait avec délectation, lorsque, ébloui par le soleil, son
esprit complètement enivré de crème glacé, il distingua devant lui, à une
vingtaine de mètres, sa chienne Marty se
dresser brusquement sur ses pattes, et se mettre à courir à toute vitesse vers
la route. Le moteur de la voiture était puissant, et la chienne de toutes ses
forces poussa la petite Willa de l’autre côté de la route, tandis qu’un déchirant
crissement de pneus retentit. Sam Smith sentit son cœur s’arrêter dans sa
poitrine lorsqu’il vit voltiger en l’air, avec quelques autres petits morceaux,
la patte droite de Marty, encore accrochée à un morceau de cage thoracique.
Elle retomba mollement sur la route avec un bruit mouillé de viande
ensanglantée. Sam jeta sa glace par terre et couru vers la voiture verte dont
le parechoc avant était recouvert de sang.
La petite Willa était assise sur le
rebord de la route, en larmes, son visage recouvert du sang de l’animal. Il y
avait des petits morceaux de chair comme des carrés de mousse un peu partout.
Le ballon rouge lui-même roulait encore le long de la route, laissant une trace
ensanglantée derrière lui. Sortirent de la voiture côté passager une jeune
femme blonde en larmes, côté conducteur un jeune homme brun complètement
désorienté dont la joue était rougie par la marque d’une main. Horrifiée par ce
qui venait de se produire, la jeune femme blonde fit le tour de la voiture et
poussa son compagnon en lui hurlant dans les oreilles qu’il avait bien failli
tuer une petite fille. Elle l’insulta, l’humilia davantage en visant son manque
de virilité et pour finir, lui mit une autre grande gifle, sur l’autre joue, ce
qui fit sursauter le jeune Sam déjà tout tremblant d’horreur, venant d’arriver
à leur hauteur. L’odeur de caoutchouc brûlé, de goudron chaud frappé par un
soleil d’été et d’essence était très forte en plus du ronronnement des grillons
accentuaient sa terreur de regarder sous les roues. Elle est peut-être encore
vivante se dit Sam dans un dernier souffle d’espoir.
Il s’approcha lentement du corps désarticulé
de sa chienne. En voyant sa patte arrachée et un morceau de sa cage thoracique
absent (on lui voyait un morceau de poumon sous le muscle et les côtes), il
pensa qu’elle était morte et tout s’écroula à nouveau. Mais Marty commença à
gémir les yeux fermés, très faiblement. La surprise de Sam de l’entendre était
comme un rayon de soleil perçant une nappe de nuages sombres. Ces pleurs lui
rappelèrent ceux qu’elle faisait, par caprice, lorsqu’on ne la laissait pas
entrer dans la cuisine, embaumée d’odeurs de nourriture alléchante. Le jeune
Sam Smith, le visage rougit par la tristesse, comme suspendu par les pieds au
bord d’un précipice, demanda calmement au jeune couple s’ils possédaient une
couverture dans leur voiture. La mère de Willa arriva et regarda avec horreur
les lieux du drame. Essoufflée, elle souleva sa fille et la serra contre elle
et Sam se vit donner par la jeune femme blonde une couverture qu’elle possédait
dans le coffre de sa voiture verte. Elle lui dit combien elle était désolée,
elle et son petit ami étaient en train de se disputer dans la voiture et ils
n’avaient pas vu la petite, ni la chienne. Cette jeune femme elle-même pleurait
à chaudes larmes à cause du choc de l’incident qui venait de se produire. A
vrai dire, elle était plus bouleversée à présent par la douleur qui émanait comme
une onde de chaleur du corps de l’adolescent.