mercredi 2 avril 2014

Le quai des merveilles [Crazy Von Schweetz]



C'était une belle nuit de Noël. Le genre qu'on ne voit qu'à la télévision dans de niais feuilletons à base de gens heureux et unis dans l'adversité, de flocons qui virevoltent au souffle d'un doux vent d'hiver, de nuits calmes sur lesquelles veillent les bons esprits de l'amour et que regardent les familles dans le confort d'un salon à la quiétude à peine froissée par le crépitement des bûches incandescentes dans le foyer (doux foyer) de la cheminée. Une époque où l'on oublie ce qui nous chagrine, un moment d'intense bonheur à partager et de pardons à accorder.

Alors c'est sûr que par le prisme cathodique, le vingt-quatre décembre est source de joie et de confort. Ne pas gêner, ne surtout pas choquer ceux qui vont bien même s'il n'est pas interdit de caresser leur sensibilité en leur rappelant que pendant qu'ils dégustent la dinde, d'autres crèvent la faim par delà les fenêtres des vastes demeures synonymes d'abri et de bienveillance. Ceux-là, les malheureux qui ont faim et froid, on en parle un peu au journal de vingt heures et l'on montre qu'on s'occupe d'eux. Ou deux plutôt, parce que sur dix il y en aura huit autres qui resteront cachés, oubliés. Parce qu'on ne peut pas nourrir tout le monde, parce qu'on ne le veut pas. Parce qu'il ne faut pas le dire. Ne rien dire, voir ou entendre qui puisse être mal.
Et les foyers se remplissent, les débris vivants s'amoncellent aux portes des accueils de jour comme de nuit, cherchant qui de quoi se nourrir ou qui de quoi se réchauffer. «Trop de monde, pas assez de place» se plaindront les travailleurs sociaux dans la presse où sur les écrans, ceux-là mêmes qui préfèrent rassurer avec les téléfilms calibrés pour les vacances de Noël.
Quand on est l'abri, on veut bien se soucier de celui qui n'y est pas mais bon, qu'est-ce qu'on peut faire ? Le mieux reste donc de s'emparer de la télécommande et de vite changer de chaînes. Rassurons-nous par l'ignorance ! Pas de mépris, probablement même pas de lâcheté mais ce besoin finalement bien humain de ne penser qu'à soi. Tout en y dormant. Pour les autres, pour ceux-là, ce sera au mieux un matelas froid qui sent l'urine, au pire un carton. Les moins chanceux auront droit à un manteau naturel immaculé. Comme un linceul.


Parmi ceux là, il y avait Christine. Un nom d'un autre âge pour une jeune fille d'à peine dix-neuf ans. Pauvre petite marchande d'allumettes qui avait la malchance de ne même pas fumer. Cendrillon sans citrouille ni bonnes fées pour veiller sur elle. A écouter son estomac se lamenter, il y a fort à parier qu'elle aurait préféré le cucurbitacée à la magie d'une gentille petite bonne femme volante, un chapeau pointu fiché sur le crâne.
C'est une casquette que l'ex-adolescente portait sur sa tête blonde. Un couvre-chef blanc à la visière rouge avec le logo d'une grande surface commerciale imprimé sur le front. Un gros anorak délavé, autrefois bleu, pour se protéger de la nature et accompagné d'un sac à dos, excroissance vitale du routard. Une paire de Jeans déchirée aux genoux que n'auraient pas renié certains membres de la mouvance grunge, sauf que dans le cas de Christine ce n'était pas vendu neuf dans cet état. Hipsters ou Chipsters, la pauvre préférait les biscuits parce que ce n'est certain pas le look qui vous remplit le corps et vous donne la force de continuer à avancer. Et avancer, c'était tout ce qui lui restait ce soir.

Tandis qu'elle marchait la tête baissée, elle ne put s'empêcher de sourire en contemplant sa vieille paire de baskets la devancer, les semelles écorchant à chaque pas un peu plus de caoutchouc sur des dalles râpeuses. La dalle, elle l'avait. Et pas qu'un peu. Dans le ventre, dans la tête et sous ses pieds. Ironie du sort, bonsoir ! Et c'était sans compter l'innocente cruauté des nantis et l'incessante fumée s'échapper des hottes et des cheminées. Non seulement ça sentait le chaud, mais en plus ça sentait bon. Et pas d'humeur à se lamenter sur le triste destin de dizaines de milliers de dindes en train de cuire dans les fours dans ces moments-là.

Si elle voulait manger, Christine n'avait pas trente-six solutions. Trois choix s'offraient à elle :

  • se poster près d'un restaurant et attendre que les poubelles se remplissent.
  • Trouver un refuge et y goûter leur soupe immonde mais qui tient au corps.
  • S'automutiler et profiter des restes.
Le premier choix se verrait bien vite barré si elle avait eu un stylo. Pas de restaurant ouvert le soir du réveillon de Noël dans cette petite ville miteuse où la pauvre Christine avait échoué. Et tant qu'à faire, pas de refuge non plus. Il y en avait bien un une quinzaine de kilomètres en amont dans un patelin un peu plus grand que là où elle se trouvait mais justement, elle préférait l'éviter par crainte des représailles. En effet, notre Mater Dolorosa des faubourgs avait profité d'une nuit là-bas pour faire les poches de ses camarades d'infortune. Ça s'était su, ça devait se payer aussi s'était-elle carapatée vite fait bien fait.
Enfin, surtout vite fait puisqu'elle en était réduite à errer dans une commune-dortoir mais dénuée du moindre lit. Christine se disait que si elle était née à Limoges ou à Moustier, au moins elle n'aurait jamais manqué de bol. Oui, on peut être à la rue, transie de froid, affamée et ne pas perdre son sens de l'humour. Adieu donc le gîte des déshérités, bonjour la poisse à Triffouillis-Berlette, son clocher, ses rues désertes (même pas un chien pour lui courir après ou au mieux lui tenir compagnie), sa place aux terrains de boules enneigés et son grand rien qui ferait peur s'il ne rendait pas triste !

La tristesse. Ce mets plus amer que doux qu'il vous reste à croquer, ou plutôt à sucer comme l'écume sur la silice d'une morne plage. C'était loin ça, déjà. La tristesse. On l'éprouve bien à un moment ou un autre d'une vie d'errance mais elle s'attache à vous aussi est-ce une ennemie qu'on préfère s'en faire, sans fers. La tristesse, Christine l'avait laissée à la caisse de la boutique des sentiments. Parce qu'il faut bien que la carte de crédit soit refusée de temps en temps. Elle fera sans, c'était décidé. Elle ne pouvait même plus se la permettre, de toute façon, la tristesse. Pourtant, cette dernière pointait souvent le bout son nez à travers des publicités de télé-achat avec facilités de paiement. Et dans ces moments-là, il n'y a qu'une chaîne dans le bouquet. La misère c'est le câble mais le choix des programmes n'est pas folichon. Et la tristesse aurait tendance à être l'une des plus fréquentées. En tout cas, c'est le désespoir qui tel l'ORTF d'antan, récolte des piques d'audiences vertigineux. Mais ce soir, Christine avait décidé de trouver un autre canal, et c'était une émission sur la cuisine qu'elle s’apprêtait à regarder.

Pour le moment, son seul spectacle c'était ses pieds. Et sa paire de Nike flambant vieilles fabriquées par deux ou trois petits chinois qui étaient sans doute moins dans la détresse qu'elle. Christine vit alors que sa vue se brouillait légèrement. Elle ferma les yeux et fut prise d'un vertige. Pas désagréable sur le moment, pensa-t-elle. Cette sensation de petit bien-être mêlé à une nausée presque salvatrice. Mais les bonnes choses ont une faim et la jeune fille rouvrit ses paupières. Une lumière vive mais pas trop l'éblouit néanmoins. Celle d'un lampadaire à l'ampoule vacillante, pas bien loin. Une trentaine de mètres. Jouable. Et à la droite du lampadaire qui brillait comme le phare indiquant la terre, un gros bâtiment défraîchi trônait comme la gloire passée d'une petite ville ouvrière. Une gare. Christine jeta un œil sur sa gauche, un autre à droite. Personne. Et devant elle, ce bel abri de fortune lui ouvrait ses portes.

Elle connaissait les gares. Elle y avait souvent dormi et autrefois y avait même pris des trains. En quête d'ailleurs, parfois. Pour s'échapper, souvent. Christine n'avait pas attendu cette dernière année, celle de ses dix-neuf ans, pour vivre une vie misérable digne de Dickens sans le happy end. Partir, pas revenir. Et quand on n'a pas d'argent, le train reste la meilleure solution. Et qui dit train dit gare. Aussi Christine aimait les gares. Ce genre de locaux motive. Aussi Christine accéléra le pas, regardant droit devant elle, esquissant comme un semblant de sourire parce qu'elle était certaine que, même pour une nuit, elle pourrait éventuellement trouver le salut à cet endroit.
Plus qu'une quinzaine de mètres et elle serait devant la lourde porte vitrée et grillagée. Un détail qu'il faudra gérer en temps et en heure. Les portes sont faites pour êtres ouvertes, pas de raison que celle-ci n'en fasse pas autant. Et au pire, il y a toujours moyen d'accéder au quai et là, il y a toujours des endroits pour se calfeutrer en attendant. En attendant quoi ? Ça , c'était l'autre détail auquel Christine préférait ne pas vraiment songer, même s'il n'était pas du genre à lâcher l'affaire, celui-là. Il lui faudrait alors trouv...

Bimbadaboum...bimbadaboum ! Les lèvres de la jeune femme vinrent embrasser goulûment le macadam qui recouvrait le trottoir menant à la gare. Son front se fit humble contre le sol neigeux mais pas assez pour amortir. Et son genou gauche se déchira dans le choc. Une douleur vive, piquante mais que Christine pouvait s'en accommoder. La douleur, qu'elle soit morale ou physique, on vit avec dans sa situation. Si tout à l'heure elle n'avait pas trente-six solutions, elle avait vu l'espace d'un instant trente-six belles chandelles qui tournoyaient joyeusement au-dessus de sa tête.

Christine s'empressa de regarder des deux côtés de la rue. Personne, évidemment, mais il n'empêche que la misère n'empêche pas la dignité, ou plutôt l'envie de ne pas se taper la honte devant tout le monde. Durant quelques secondes, elle remercia le ciel et le Dieu des clochards de l'avoir faite chuter dans le dénuement humain le plus total. Puis elle s'intéressa à la responsable de sa chute, qui se tenait horizontalement droite, un bon mètre derrière elle. Et là, Christine ne put s'empêcher de sourire, puis de rire franchement.
Une bûche. Une belle bûche de bois, probablement de châtaigner, étendue sur la chaussée. Qui était-elle ? D'où venait-elle ? La question resterait entière. Mais risquer de mourir à cause d'une bûche le soir de Noël sonnait comme un coup du destin pas piqué des hannetons. «La salope !» pensa Christine à l'attention du restant de branche. Elle se releva assez facilement, plus de peur que de mal («Non mais oh ! Même pas de peur du tout !» vous répondrait-elle) et s'approcha de la bûche, lui donnant un léger coup de pied comme un vérifierait l'état de santé d'un animal mort. Elle apprécia de constater que l'objet du délit ne bougea pas. Christine se dépêcha donc de remettre son sac qui était parti de traviole et continua sa route vers la gare, non sans se retourner vers la bûche pour l'honorer d'un doigt d'honneur victorieux.

Son genou lui faisait mal mais ne l'arrêterait pas. La petite marchande d'allumettes se tenait devant les grilles du château ferroviaire, prête à demander asile et pitance, le cas échéant. Évidemment, le local était fermé. Ce n'était pas une surprise pour Christine. Les portes verrouillées, elle connaissait et ce n'était certainement pas une serrure véloce doublée d'un rideau de fer qui auraient raison de sa volonté. Mais ça c'est surtout ce qu'elle se disait pour se donner du baume au cœur mais, au fond d'elle, Christine commençait singulièrement à fatiguer.
Une secousse, pour le cas où. «Au p'tit bonheur la chance» dit-on dans ces moments-là, pour faciliter le sort. Mais quand ni le bonheur (même petit) et ni la chance ne vous accompagnent gaiement sur la route du vide, les possibilités de succès restent réduites. Néanmoins, le jeune femme ne voulait se résoudre à l'échec. Bien-sûr que la porte ne céderait pas facilement mais ça valait la peine d'essayer. Hors de question cependant de forcer. Il ne fallait pas attirer l'attention. Cette gare demeurait la perspective d'une nuit à l'abri du froid et de la neige et il aurait été plus que regrettable qu'un excès d'enthousiasme rende les heures à venir difficiles.
Alors que son genou écorché avait décidé en bon petit anarchiste corporel d'intensifier la douleur causée par la bûche, Christine se décida de contourner la porte principale. Sur le côté du bâtiment, juste au-dessous du lampadaire ambiance discothèque, il y avait une haie d'arbustes. Mais entre l'orée de la haie et la gare elle-même, une petite grille prônait fièrement, à la manière d'un chevalier d'autrefois gardant l'accès d'un pont.
«No shall pass !» pensa la blonde souillon, un petit sourire au coin des lèvres gonflées par leur contact avec le sol il y encore quelques minutes. Elle se mit alors à avancer lentement vers cette grille, et sentit son cœur se mettre en action, puis battre franchement la chamade au fur et à mesure qu'elle s'en rapprochait. Quel suspense intense ! La porte grillagée serait-elle ouverte ou faudrait-il l'escalader pour accéder à l'autre côté ? Réponse dans trois,deux,un...






Christine se tenait devant la grille. Elle sortit la main de sa poche pour effleurer la clinche. Ce mouvement lui rappela d'ailleurs ce qu'un vieux clochard d'évidence aviné lui avait dit une fois : «Ne jamais marcher avec les mains dans ses poches ! Si on tombe, on peut pas se rattraper».
Et il avait raison, le bougre ! Si elle avait sortit ses deux mimines du fond de son anorak, Miss allumettes aurait sans doute pu anticiper sa trépanation buccale sur le goudron et la transformation furtive de son genou en steak tartare. Elle retourna la tête vers la bûche, qui n'avait pas changé de place depuis la dernière fois et qui lui donnait la néfaste impression de la narguer avec toute la morgue que sa condition d'amputation de hêtre desséché lui permettait. Et puis qu'est-ce qu'elle fichait là, cette bûche, bon sang ??!! On n'a pas idée de laisser traîner des bûches de bois devant une gare le soir de Noël.

Le regard de la blonde quitta l'arrogant rondin pour se focaliser sur la poignée de porte de la grille. Ce n'est pas qu'il faisait froid mais quand même un peu. Et mieux valait ne pas se faire remarquer à rôder trop longtemps devant la gare. Le cœur net. La main se pose. Les doigts trépignent et empoignent le métal glacé et couvert de neige. Tel un animal blessé, la clinche pousse un petit cri que Christine aurait préféré éviter. Elle venait de comprendre le sens, du moins selon elle, de l'expression «Tout baigne dans l'huile» et s'amusa d'un «Toute beigne dans l'huile» à l'occasion d'un match de catch féminin se déroulant dans un bac rempli de liquide ruisselant et dégoulinant. Une façon comme une autre de distiller l'angoisse.
La porte était ouverte. Ou bleue ? On ne pouvait le deviner avec toute cette neige. Quoi qu'il en soit, le pont-levis menant au château venait de s'abaisser et il était l'heure d'envahir le royaume.

C'est les yeux pétillants que Christine faisait connaissance avec la face cachée de la gare. C'était un quai pas très gai, voire même détraqué. Mais qu'est-ce qu'on peut y faire ? Ni trop grand, ni trop petit. Rien de comparable avec ceux d'une grande gare de métropole mais étonnamment vaste pour une si petite ville qui ne le méritait presque pas, finalement, ce quai. Pas un bruit, pas un mouvement. Le silence chatouillé par les vibrations électriques de deux lampadaires. Un escalier souterrain menait de l'autre côté, vers les trains en partance dans la direction opposée. Derrière, de vieux wagons destinés aux voyageurs avaient probablement été laissés à l'abandon. Ils portaient les stigmates colorés de graffitis bariolés. Christine s'essaya au déchiffrage de certains d'entre-eux mais l'art des rues est aussi un code qu'elle ignorait. Aussi abandonna-t-elle rapidement même si elle se sentait proche de cet esprit de rébellion urbaine par la beauté de la peinture. Elle se dit aussi qu'avec un petit coup de pouce, les portes de l'un des wagons ne seraient-elles pas bloquées et qu'elle pourrait alors y passer la nuit. Surtout que l'heure tournait et que l'horloge de la gare indiquait qu'il était bientôt minuit. Dormir. Et manger. Surtout manger.

Christine s'aventura sur le quai enneigé. Les portes arrières de la gare étaient également fermées. Pas d'accès possible à l'intérieur. Mais cela rassura la jeune fille qui conservait quelque velléité de conscience et qui préférait finalement ne pas avoir à s'introduire dans un endroit qui lui était de toute façon interdit. Et puis, il y avait toujours les wagons.
C'est une lumière qui attira son attention derrière un gros mur qui encadrait les portes. Une lumière faible mais vaillante. Celle d'un distributeur.
C'était Byzance ! Juste devant la blondinette, le fier gros bloc de métal et de plexiglas proposait tout un assortiment de nourriture parfaite pour la santé. Chips, chocolats, bonbons acidulés au doux parfum chimique de fruits, gâteaux...de quoi se remplir le ventre et tenir un petit moment tout en se régalant. Ah ça...c'était autre chose que la soupe populaire ou les steaks hachés à moitié cuits des refuges où elle avait pu traîner ses guêtres.
Un ami de passage, Freddy, lui avait appris à attraper des friandises de distributeur en utilisant un porte-manteau de fer démantibulé. Ce n'était pas bien compliqué mais cela nécessitait doigté et adresse. Or, il se trouvait que Christine avait bien retenu les leçons et était devenue plutôt douée pour chiper des chips.

Elle se débarrassa de son sac à dos. A la manière des escargots et des tortues, c'était un peu sa maison que la jeune fille portait sur elle. Quelques sous-vêtements de rechange dont au moins deux qu'elle essayait de garder propres pour les grandes occasions, deux gros pull-overs généreusement subtilisés dans un magasin (oui ben la conscience hein, parfois...), une deuxième paire de Jeans, visiblement moins abîmée que celle qu'elle portait ce soir-là. Deux bonnets, une autre casquette sans marque dessus, un polo en bon état, une paire de haut-talons qu'elle avait trouvée quelques mois auparavant dans la rue (vrai de vrai!) , un magazine de sudokus en partie rempli et un Game boy sans pile mais auquel elle tenait comme un trésor. Enfin, une grosse couverture de laine et un tapis de sol enroulé venaient combler le sac. C'était ses biens, sa vie, ses inanimés compagnons d'infortune. Et le fameux porte-manteaux ! Elle s'en empara bien vite et se mit en tête de s'offrir un repas de Noël digne de rien. Ou digne d'elle, finalement.

Un rapide coup d’œil pour la convaincre qu'il n'y avait pas de caméra de surveillance. Ce n'était pas le cas mais quand bien même, Christine doutait que les forces de l'ordre viennent l'arrêter un soir de réveillon pour vol de saloperies dans un distributeur automatique. Elle se mit à genou (douleur) et bien vite,déplia le bout de métal et l'inséra sous le compartiment prévu à la réception des denrées légalement payées. La jeune femme s'appliqua, passant la langue comme une enfant qui cherche à bien faire, et parvint sans trop de peine à faire tomber une barre chocolatée qu'elle se dépêcha bien vite d'attraper, de déballer et de manger. Nonobstant son appétit, Christine fit attention à ne pas dévorer trop rapidement le chocolat afin d'éviter le même triste sort que le fameux Freddy qui lui avait appris à dévaliser les distributeurs. En effet, celui-ci était mort étouffé par un Mars. La nature étant bien souvent mal faite, il aurait sans doute été préférable qu'il passe de vie à trépas à cause d'un Bounty car au moins, ça vous donne un vrai goût de Paradis.

La blondinette affamée ne pouvait se contenter d'un morceau de chocolat d'une dizaine de centimètres de long et décida de s'attaquer aux chips. Mais, prise dans son élan et d'un excès de confiance, elle ne parvint qu'à casser le porte-manteau qui lui servait à déclencher la chute des aliments. Elle savait bien que ce n'était pas solide et qu'il fallait faire attention en manipulant ce genre de crochet fait main mais la situation et le «ragaillardissement» fourni par la barre l'avait poussée à l'irréparable. Bimbadaboum...bimbadaboum !
Les espoirs de ventre-plein s'envolaient lentement mais sûrement. La cassure du fil de fer était telle qu'il n'était plus d'utilité à présent. Christine aurait pu utiliser les deux euros qu'il lui restait pour s'acheter un paquet de Chips mais c'était son unique fortune et elle avait l'intention de la garder le plus longtemps possible. Elle se releva et donna un coup de pied à la machine. Les images de festin de caries qui dansaient dans sa tête il y a encore quelques minutes s'estompaient les unes à la suite des autres. C'est à une triste réalité que les bonheurs fugaces laissent la place. Et la réalité de Christine, c'était d'avoir faim pendant encore un bon moment tout en essayant de dormir sous un banc ou contre le distributeur qui était source de chaleur. Car dans des moments comme celui-ci, on en venait à douter d’éclaircies dans les ténèbres. Et tant qu'à faire, les wagons où Miss allumettes aurait pu passer la nuit seraient probablement inaccessibles. Ou alors...ou alors aller chercher la bûche qui l'a faite tomber tout à l'heure et se venger à la fois sur cette dernière et sur le distributeur en utilisant le bout de bois pour fracasser la vitre et s'emparer des trésors culinaires qui se trouvaient derrière. Elle y pensa. Puis abandonna très vite l'idée. Il ne lui restait plus qu'à dormir, ou tout du moins à se parer du froid et de la neige en attendant le jour.

Christine, découragée comme un champion qui termine dernier d'une course réputée facile, se laissa tomber les fesses les premières sur le quai, les pieds dans le vide à quelques centimètres des rails. Non, elle n'avait pas l'intention d'en finir et d'attendre le premier train venu pour se jeter dessous. Mais elle y pensa. On y pense toujours quand on vit la vie de Christine. La force morale et la justesse d'esprit n'évitent pas dans les situations de détresse d'exprimer l'envie d'arrêter les frais. Mais elle se disait toujours qu'elle était encore bien jeune, que le soleil brillerait de nouveau pour elle.
Mais dans ces moments-là, c'est la nuit qui l'emporte. Dans ces moments-là, on se souvient des belles choses. Dans ces moments-là, on pleure. Et c'est ce que fit Christine. Mémoire estropiée d'une enfance pas bien heureuse mais avec de bonnes passes, les parties de football dans l'herbe fraîchement coupée du terrain vague avec les copains des foyers, le premier baiser échangé avec Julien le voisin de la seconde famille d'accueil. Et les dérapages, les fuites, les attouchements dans les refuges, les claques dans la figure...cet immense trou béant qui vous engloutit plus lentement que le gouffre de Sarlacc ne l'a fait pour Bobba Fett. Alors on pleure.
Et Christine se tenait là, dos au distributeur, à la gare, à la ville. Assise sur le quai, sans attendre de train qui de toute façon n'arriverait jamais. A se demander de quoi l'avenir serait fait, à le redouter, à s'en ficher, à exprimer des émotions contradictoires l'espace de quelques micro-secondes. Et rien, rien ne viendrait la déranger, pas même un chien errant, pas même un compagnon d'infortune. Seule la neige et le calme pas forcément bienveillant de l'hiver. Et ce paquet de bonbons qui vint lui heurter délicatement le dos avant de retomber par terre, dans un bruit de douceurs qui s'entrechoquent au plastique gélifié par le sucre. Puis un autre, et un troisième.

Christine se retourna brusquement, la frayeur dans le le regard embué. Il n'y avait rien derrière elle. Rien d'autre que le distributeur, son sac à dos, les restes du porte-manteau...et les trois paquets de bonbons entassés l'un sur l'autre à quelques centimètres du séant de la jeune fille. Elle s'empara non presque sans crainte de l'un des paquets, le pesa, le jaugea puis scruta les quatre points cardinaux à la recherche de l'identité de ce possible bienfaiteur qui lui avait laissé de la nourriture. Rien. Ni personne. Sans demander son reste, Christine ouvrit le paquet, prit un bonbon et hésita à le porter à sa bouche. Elle le mangea. Une petite boule à la fraise remplie d'une crème qui lui éclata sur les dents. C'était un délice. Les riches pouvaient bien s'étouffer avec leurs bûches glacées (ou glisser dessus), même les desserts les plus chers des pâtissiers les plus renommés ne valaient pas cette petite boule à la crème. Et il y en avait d'autres dans le sachet. Et plein de parfums !
Miss Allumettes sécha ses larmes d'un revers de manche d'anorak. Alors qu'elle allait goutter d'autres sucreries, un claquement fut émis par le distributeur juste en face d'elle. Le clapet donnant accès à la nourriture venait de s'ouvrir tout seul. Un paquet de chips en surgit et acheva son vol plané contre le front de la blondinette. Surprise comme effrayée, Christine eut un brusque mouvement de recul et manqua de tomber sur la voie. Elle se retint d'elle-même et s'éloigna de la bordure du quai, tout en faisant attention à ne pas rester devant la machine. Quelle diablerie pouvait bien faire agir l'engin de la sorte ? La jeune fille voulait s'assurer qu'elle ne rêvait pas, qu'elle n'était pas en train de délirer, à l'agonie suite à sa chute sur le trottoir dans la rue. Elle se donna du talon droit un coup dans le genou gauche et retint un hurlement. Pas de doute, elle avait toujours mal, et bien mal même. Et froid. Et faim par dessus le marché. Donc non, elle ne rêvait pas et n'était probablement pas morte.
Christine se mit en chemin vers le distributeur. Celui-ci demeurait droit et stoïque et ne régurgitait plus d'aliments depuis l'envol du paquet de lamelles de patates séchées et salées d'il y a un instant à peine. Alors qu'elle s'en approchait, une des lampes éteintes fixées au mur-arrière de la gare s'alluma sans la crier. Puis une autre, puis toutes les autres. Une bonne dizaine d'ampoules venaient ainsi d'éclairer l'endroit. Christine chercha à se mettre à l'abri, à se cacher d'un éventuel gardien qui venait de remarquer sa présence. Elle se précipita comme elle pouvait sous un large banc de béton et s'y glissa, non sans que son genou lui rappelle à son bon souvenir qu'une belle plaie le surmontait.
Elle attendit une bonne minute, se rendant compte que son sac à dos était resté à la vue de toute le monde, près du distributeur. Elle hésita à aller le chercher mais la douleur et une fatigue diffuse mais persistante la firent renoncer. Deux minutes. Trois. Quatre. Rien. Pas un chef de gare vieillissant et trapus, le sifflet à la bouche, n'était venu déranger la quiétude de l'endroit.





Christine s'extirpa du banc, comme une biche à l’affût. En essayant de faire le moins de bruit possible, elle s'avança en direction de son sac, s'en empara et en profita pour toucher le distributeur automatique. Celui-ci ne réagit pas. La jeune fille rangea ses affaires, dos au quai. Elle ne comprenait pas très bien ce qui se passait mais n'avait plus trop envie de traîner dans les parages. Enfin, elle avait vu suffisamment d'émissions consacrées aux phénomènes surnaturels pour se douter qu'il n'y jamais rien de bon dans de genre de manifestation paranormale.
Et pourtant, l'action de la machine n'était pas forcément une mauvaise chose. A la peur se juxtaposa l'envie de savoir, l'envie de rester. Elle avait maintenant de quoi manger et elle pouvait à présent jeter un œil aux wagons de l'autre côté des voies afin d'y trouver une entrée et peut-être d'y dormir, à l'abri pour une nuit du froid et de la neige de Décembre.

La jeune fille s’exécuta et décida de traverser la voix plutôt que d'emprunter les escaliers qui la mènerait de l'autre côté. Un soupçon d'indolore rébellion dans un monde de soumission, selon elle. Pas de train à l'horizon. Aucun risque. C'est au contact de ses pieds contre les rails et les cailloux qu'elle se rendit compte que son genou blessé aurait sans doute préféré l'escalier. Mais le mal était fait. Elle était en bas et se dépêcha bien vite de rejoindre la rive d'en face. C'est là qu'elle se rappela qu'il fallait à présent grimper la bordure d'un bon mètre de haut et que ce même genou allait évidemment lui rappeler à son bon souvenir. Mais bon, Christine parvint sans trop de difficulté à escalader et se retrouva alors face au dos de la gare et au distributeur magique. L'endroit était toujours aussi calme et passablement inquiétant.

Miss Allumettes vérifia encore et toujours qu'il n'y ait bien personne dans les parages et entreprit d'ouvrir la porte à battant du premier wagon. A peine eut-elle effleuré la poignée métallique que les deux volets s'actionnèrent ! Un mouvement de recul. Christine n'avait même pas touché la porte ! «Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?» marmonna-t-elle. Ce n'est pas que c'était devenu normal pour elle mais les événements bizarres autant qu'étranges qui semblaient se dérouler ici l'inquiétaient moins, à présent.
Elle entra dans le wagon. Celui-ci était en piteux état. Les sièges étaient pour la plupart déchirés, tagués, et mal en point. La mousse s'extirpait des trous, les tablettes de lecture avaient été arrachés des parois et il y avait plusieurs carreaux de cassés. De plus, elle ne devait pas être la première à s'être introduite dans l'endroit puisqu'il y avait des couvertures souillées par terre. Le wagon, le squat préféré des clochards et des sans domiciles quand l'hiver s'en vient.
Christine avança au milieu des débris du compartiment et se chercha un endroit pour manger ses saletés chimiques, ses chips et essayer de dormir. Par chance (comme quoi des fois...), elle n'eut pas à marcher longtemps avant de tomber sur un siège en bon état juste au dessous d'une vitre qui n'avait été fracturée en mille morceaux. L'endroit lui paraissait fréquentable même si son côté lugubre n'en aurait pas fait mener large à beaucoup. Mais bon, malgré l'ouverture automatique des portes tout à l'heure, qu'elle mettait sur le compte d'un éventuel soubresaut de technologie rouillée ou d'un courant d'air, la blondinette en casquette se dit qu'elle tenait là son campement pour la nuit. Ce n'était évidemment pas ce que l'on pouvait rêver de mieux pour passer le réveillon mais ça ferait l'affaire, se disait-elle tout en prenant ses aises.

Les minutes passèrent et les dents de Christine prenaient cher tandis que la demoiselle ingurgitait ses paquets de bonbons et de chips. Elle avait décidé d'en garder un pour le lendemain, au cas où. Elle se dit aussi qu'elle avait soif. Pour ça, pas besoin de payer ou d'attendre qu'une machine détraquée vous fournisse en canettes de soda, cannette que l'appareil ne contenait de toute façon pas. Mais il neigeait, c'était blanc de partout et il suffisait de manger une pleine main de flocons tombés du ciel pour calmer une envie de boire. La jeune fille quitta le confort aléatoire de son petit nid pas douillet et sortit afin de ramasser un peu de neige. Dehors, il faisait suffisamment froid pour qu'elle se dépêche de revenir à l'intérieur.


Il fallait dormir à présent, il était minuit passé et elle n'en pouvait plus. L'hiver, la route, son petit coup de moins bien de tout à l'heure et l'affaire de la bûche maudite avaient raison de tout tonus pour aujourd'hui. Lasse, Christine enfila un second pull-over, remit ses gants de ski (c'est tout ce qu'elle avait trouvé chez Emmaüs), sa casquette la plus chaude, ajusta son anorak et se pelotonna sous sa grosse couverture, un des rares souvenirs de famille qui lui restait. La légende disait que c'était son arrière grand-mère qui l'avait cousue. Lé légende disait beaucoup de choses.

Le sommeil vint rapidement, sans que Christine n'ait à se forcer. Enfouie sous les tissus, elle songea encore une fois au distributeur qui s'était mis à lui donner de quoi manger, aux portes qui s'étaient ouvertes toutes seules, aux lumières qui s'étaient déclenchées par l'opération du Saint-Esprit et à cette fichue bûche sur laquelle elle avait trébuché. Puis elle ferma les yeux, espérant ne pas être dérangée durant cette nuit sacrée.
Elle ne le fut pas. Tout était paisible.

Thackoum...tchakoum...tchakoum...Chtistine se sentait comme un bébé qu'on dorlote. Comme dans un couffin qu'une main aimante berce doucement et tendrement. Et ce bruit persistant mais apaisant. Tchackoum...tchakoum...tchakoum...Elle ouvrit les yeux, les paupières collées par les larmes du matin. Comme s'il était triste de dire adieu à sa nuit, son éphémère nuit qui ne durerait que quelques heures. En se réveillant, elle s'étira de tout son long en baillant sans discrétion. Une fois les pupilles remises en place, elle se sentait désorientée, perdue. C'est en écarquillant les yeux qu'elle sursauta, attirant l'attention d'un homme âgé assis quelques mètres devant elle et qui lisait son journal. Il la regarda sans mépris et lui sourit avant de reprendre son activité de lecture.

«-Bien dormi ?» lui demande alors son voisin de siège, de l'autre côté du train. Christine lui répond d'une voix encore endormie :
«-Comme un loir en gelée !». Cela fait sourire le jeune homme qui lui s'inquiéte du sommeil de la jeune femme.
«-Et j'ai ronflé ?» l'interroge-t-elle.
«J'ai rien entendu, je dormais aussi.» le probable trentenaire ne veux pas avouer à Christine qu'elle aurait dérangé tout le train s'il avait été plein. Mais les soirs de Noël, c'est rarement le cas.
Il est mignon avec ses petites lunettes d'intellectuel et son air de ne pas y toucher. Miss Allumettes a vu dans son regard qu'elle lui plaisait.

Avec les années, elle a appris à ne plus se méfier des gens, à les accepter comme ils l'accepte. Elle a changé, s'en est sortie. La nuit où elle s'était arrêtée dans cette gare d'un bled perdu avait marqué un tournant dans sa vie. Onze ans se sont écoulés.
La petite sans domicile qui se nourrissait quand elle le pouvait de bonbons et de sucreries a compris que bûches et embûches ne l’empêcheraient pas de s'accomplir. De se retrouver. Cette machine qui l'avait nourrie, ces lumières qui s'étaient allumées pour éclairer la nuit et ces portes automatiques qui s'étaient ouvertes devant elle étaient-ils des coups de pouces du destin ? Une force supérieure qui la guidait et qui avait décidé de lui montrer la route à prendre ? Christine n'en sait rien. Toujours était-il qu'elle n'avait jamais aussi bien dormi que ce soir-là tandis qu'à dix-neuf ans et le genou écorché, elle s'était réfugiée sur le quai des merveilles. Et que les jours qui suivirent furent surprenants et bénéfiques. Bien-sûr, elle dut encore affronter crises et tempêtes mais elle avait un but qui allait au-delà de la survie, au-delà de l'errance. Cette nuit là, elle fit un rêve. Elle s'en souvient encore aujourd'hui. Un songe où les wagons de la rame abandonnée s'étaient mis en branle et l'avait emmenée par delà les nuages dans une lumière étincelante qui l'enveloppait de son bien-être. Elle avait pleuré durant tout ce rêve. Mais il ne s'agissait ni de larmes de tristesse ou de joie, juste des larmes de libération. Le malheur, la détresse et la souffrance s'étaient simplement expurgés de son corps et de son esprit. Elle avait été lavée, vidée, remise en ordre. Elle s'était vue belle, aimée et aimante, dans des endroits qu'elle n'avait jamais fréquentés auparavant. De belles villes accueillantes et saines où elle n'était pas rejetée et où elle apportait son aide.
C'était le plus beau des rêves. Quand elle se réveilla le lendemain, la neige avait cessé de tomber et recouvrait la terre d'une couche bienfaisante. Il faisait moins froid, elle avait moins faim. Elle était ressortie du wagon et s'était retrouvée sur le quai en empruntant cette fois l'escalier et non en traversant la voie. Avant de partir, Christine avait embrassé le distributeur, un doux baiser de départ et de remerciement. Jamais elle ne saurait réellement ce qui s'était passé lors de ce réveillon avec les étoiles. Mais il fallut d'une nuit pour la changer et lui faire entreprendre les fondations de ce qui serait sa vie. Sa vie.

Christine se frotte les mains et range ses affaires à l'annonce de l'arrivée prochaine à l'endroit où elle se rend. Elle en profite aussi pour réveiller sa fille de quatre ans qui dormait encore paisiblement sur le siège devant elle, emmitouflée dans une couverture légendaire. Le train en gare, elle dépose une bise sur le front de son voisin qui n'en revient pas, rougissant comme un gourmand qui se serait rué trop vite sur les piments d'un restaurant chinois.

Dehors il ne fait pas très chaud mais il fait bon. Sa fille, petite tête blonde qui se protège dans les bras de sa mère, s'amuse du soleil qui lui chauffe les joues. Christine prend l'escalier , traînant sa valise derrière elle. Elle se retrouve alors de l'autre côté, sur le quai de la gare. Là, son mari l'attend et la prend à son tour des bras. En quittant la gare, Christine remarque une bûche étendue à quelques mètres d'elle. Il n'y a bon sang de bonsoir aucune raison valable à la présence de ce bout de bois sur la chaussée. Elle murmure quelque chose à l'oreille de son époux qui, un brin surpris, reprend sa fille dans ses bras alors que sa maman se dirige vers la bûche, la jauge avant de s'accroupir et de s'en saisir. Elle revient au pas de course vers sa petite famille.

-Qu'est-ce que tu vas faire avec cette bûche ? Qu'est-ce qu'elle fait là d'ailleurs ?
-Bah ! Je lui dois bien ça. Répond Christine dans le creux de l'oreille de l'homme qu'elle aime.
Alors que tous trois s'éloignent de la gare pour regagner leur foyer, la petite blondinette, rejetonne de Miss Allumettes, s'empare discrètement du paquet de bonbons que le distributeur situé derrière eux vient de lui jeter. Elle sourit.

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