vendredi 4 novembre 2011

Au cinquième jour [Corvis et Martin Lopez)


       Cinquième jour.
On était douze au départ, nous ne sommes plus que cinq. Les seules munitions qui nous restent serviront à nous suicider. Les barricades ne tiendront plus longtemps. J’essaie de regarder en arrière, de repenser à toute cette histoire depuis le départ, mais je n’y arrive vraiment pas. Et comme il n’y a plus de futur vers lequel se tourner… Ma tête est vide. Mon arme aussi. Mon cœur également, je ne ressens plus aucune émotion. Je n’ai plus peur, je n’ai plus de colère en moi. Je suis aussi vide que les créatures qui nous attendent dehors. Je veux juste que ça finisse.    

        Certains d’entre nous voudraient finir en beauté. Héroïquement. Courageusement. Foncer l’arme au poing dans la masse houleuse, gémissante qui se putréfie lentement au bas du building. Ceux là n’ont pas encore compris que le seul courage qui nous reste est celui qui nous fera pointer le canon de notre arme contre notre tempe. Ou contre notre voisin.
Quand l’heure n’est pas aux tours de garde, à la recherche de nourriture consommable dans le bâtiment qui nous sert de prison, ou aux conseils de guerre, et que je n’ai pour seule musique que les hurlements de ceux dont même le diable n’a pas voulu, j’ai parfois envie de prendre mon flingue et de m’occuper moi-même de nous faire partir sans douleur. Ils sont encore trop humains, trop vivants pour avoir la lucidité nécessaire pour accomplir un acte pareil.
Moi il y a longtemps que j’ai perdu toute humanité. Finalement je ne suis pas si différent de ces créatures pourrissantes.
Hormis l’odeur.
Même mon instinct de survie s’est évaporé tout comme le leur. Circonstances atténuantes…
Je pourrai le faire. Je pourrai devenir notre bourreau. Et notre sauveur.
Pourtant je m’étais attaché à ces personnes. Après un mois dans cet appartement gigantesque sous l’œil de soixante-dix-sept caméras et de millions de téléspectateurs, on finit par connaître les défauts et les qualités de chacun. Mais après une semaine entière sans aucun contact avec l’extérieur, sans que la production ne réponde à nos appels ni ne nous ravitaille en nourriture, on finit par se dire que quelque chose cloche dehors. Alors même la pire des pétasses sans cervelle devient tout à la fois véritablement insupportable mais également d’une aide très précieuse.


Sixième jour.
Coincés ici, sans avenir, et pourtant nous vivons toujours. Chaque minute, chaque heure est une bataille. Mais l’instinct de survie a-t-il encore une raison d’être ? Ou n’est-ce qu’un réflexe primaire ?
J’ai beau retourner le problème dans tous les sens pour la énième fois, il n’y a que deux solutions, soit je me tue tout de suite, soit ils me tuent bientôt.
Mais je suis toujours là.
Je me repasse la scène une fois encore dans ma tête, je sens presque le goût acéré de l’acier du canon posé sur ma langue… Mais je ne fais rien.
Je suis toujours là.
Ce n’est pas que je manque de courage. C’est simplement que je ne sais plus quoi faire d’autre. Quand on a tout perdu et qu’il ne nous reste que la vie, chacun cherche à tenir le plus longtemps, même si c’est inutile. Mes yeux parcourent la pièce une fois encore. Franck fixe le plafond, Liliane semble hypnotisée par une large tache de sang sur le sol. Je sais qu’ils pensent à la même chose que moi. Avant, chaque jour qui se finissait était un jour perdu. Aujourd’hui, chaque seconde qui passe est une victoire acquise à un prix toujours plus élevé.
Je ne m’y fais pas pourtant. Je pense toujours à tout ceci comme si c’était un jeu télévisé. Les caméras tournent-elles encore ? Y’a-t-il quelqu’un qui nous regarde encore ? Quelqu’un se soucie-t-il encore de nous ? S’il y a encore des millions de téléspectateurs stupides et avachis, peut-être pensent-ils que ce n’est qu’un jeu et que tout cela est mis en scène ? Peut-être sont-ils tous morts, dévorés par un zombie de passage.
       Notre prison n’a même pas de fenêtre, juste un carré de ciel. Nous n’avons plus accès qu’à quelques pièces barricadées maintenant. Tout le reste est investi par eux. Nous ne sommes en vie que grâce aux armes trouvées sur les cadavres déchiquetés des vigiles du service de sécurité du studio de M6. Drôle d’idée que de se dire que ce qui nous a sauvé du sort de tous ces tas de viande qui nous attendent dehors c’est d’avoir participé à Loft Story 3.
       Je pourrais presque en rire si les cadavres sans tête de 5 autres candidats ne pourrissaient pas lentement dans une des pièces du Loft.
Un jeu où nous sommes éliminés un par un.
Un jeu où ce sont « ceux du dehors » qui nous éliminent.
Le but ? Survivre le plus longtemps. Quel est l’intérêt de survivre ? Pour gagner le jeu peut-être…

        Le jeu a déjà été gagné. Pas par un des participants, ni même par la chaîne. Seulement par ce grand amateur de roulette russe qu’est le déroulement des choses. Le destin, diront certains.
Si Dieu existe, il est en train de perdre au jeu.
Il nous a déplacé sur l’échiquier avec toute la logique qu’il a pu, mais « Le Malin » lui a mis échec au roi. Mais ça ne veut pas dire échec et mat. Un retournement de situation est toujours possible. La victoire n’est jamais très loin de la défaite. La victoire…
Je ne peux pas m’empêcher de penser à l’espoir, antique relique de mon optimisme à toute épreuve. La victoire. Nous sommes des candidats décérébrés, pas des soldats. Ce n’est que cet instinct d’ados attardés nourris aux séries policières qui nous a fait penser aux armes. Et encore. Si nous avions été plus cultivés, peut-être y aurait-il eu moins de morts parmi nous.
Je n’ai jamais vu de films de zombies, comment aurais-je pu savoir que leurs morsures contaminaient la victime, qui devenait un non-mort à son tour ? Lydie s’était fait mordre par un technicien qui arborait un magnifique quartier de boîte crânienne émergeant de la bouillie sanguinolente qui lui servait de visage. Miguel s’était juste fait griffer par un chat, mais son pelage rougeâtre, et le fait étrange que sa colonne vertébrale dépassant de son dos évoque une montagne russe d’os visqueux auraient dû nous mettre la puce à l’oreille.
Mais tout est allé si vite. Les portes du Loft que nous avons réussies à forcer, l’éclairage verdâtre des néons brisés, les moniteurs et les bureaux détruits, la semi-pénombre, les mouches, les vitres maculées de sang, les cadavres éventrés, empalés, déchiquetés, lestés de quelques membres, et surtout l’odeur. Cette odeur… de souffrance. C’était quitter un paradis aseptisé pour un enfer dantesque. Puis sont venus les bruits, les chocs, les cris, les borborygmes asthmatique, et ces formes vaguement humaines qui couraient vers nous comme des animaux blessés. Nous nous sommes enfuis tout d’abord. Par je-ne-sais quel miracle, nous sommes tombés sur le poste de sécurité.

        Tandis que je me repasse tout le film des évènements depuis le début espérant trouver une solution qui nous aurait échappée jusqu’ici, la petite voix du désespoir me répète sans fin l’inutilité de me creuser la cervelle (les zombies s’en chargeront assez bien...) Mes pensées s’emmêlent une fois de plus et je pousse un cri de rage qui fait sursauter tout le monde.

« Putain! Une idée merde! Faut qu’on s’arrête de penser à ce qui pourrait nous arriver et qu’on pense un peu à ce qu’on pourrait faire pour que ça n’arrive pas! »

         Je repasse ma phrase dans ma tête (une phrase de 25 mots, ça en fait 20 de trop pour être compris...) et me demande ce que les spectateurs en penseront par pure habitude. Si des spectateurs sont toujours devant leur poste, si le jeu continue toujours, alors ça vaut le coup d’essayer de s’en sortir. Pour gagner. C’est pour ça que je suis venu. Gagner, être le dernier à sortir d’ici, être celui qui a séduit le public. Sortir sous les acclamations des gens. Être invité dans des émissions de télé, entendre mon nom à la radio, partout. Dehors, c’est que du bonheur.
Mais si plus personne ne nous surveille... Si les caméras ne fonctionnent plus... Si le monde nous a oubliés parce que des morts affamés ont monopolisé son attention depuis une semaine... Alors quoi?
Pourquoi tout s’embrouille dans ma tête? Pourquoi suis-je incapable d’aligner deux pensées cohérentes dans ma putain de cervelle? Deux mois que toutes mes pensées sont orientées vers un seul but, plaire aux spectateurs. A tout prix. Maintenant je ne peux plus penser à autre chose.


          Septième jour.
J’ai fait un cauchemar horrible hier. On m’annonçait que les spectateurs m’avaient choisi pour quitter le loft et j’étais jeté dehors au milieu d’une foule d’admirateurs zombifiés qui se précipitaient sur moi pour me dévorer, faire de moi un des leurs. A nouveau. Retomber dans l’anonymat, le néant d’où m'a tiré cette foutue émission. Un zombie parmi les autres...

         Mes potes, mes concurrents me regardent de cet air bovin caractéristique, mais j’y lis également la peur et l’impuissance.

« Chais pas... J’vois pas c’qu’on peut faire de plus, hein? Y a plus qu’à attendre...
- Mais attendre quoi bordel! Attendre qu’on se fasse bouffer? C’est ça? Faut se battre! On est la pour finir ce jeu. Et il faut se battre pour ça. Ce n’est qu’une épreuve de plus! On la passera comme les autres et on pourra continuer le jeu. Faut penser aux spectateurs! 
- Mais de quoi tu parles? »

       Tous me regardent comme si j’étais fou. Mais maintenant je sais. Je ne suis pas fou, c’est eux qui sont en train de laisser tomber. Ils vont abandonner et je vais gagner. Mais j’ai tout de même besoin d’eux...

« Vous avez encore pas compris, hein ? Vous avez rien pigé du tout ! Vous croyez que c’est une fatalité ? L’Apocalypse ? Allons, ne vous faites pas plus bête que ce pourquoi la production vous a choisis… »

       C’est une épreuve de plus. Une épreuve pour apporter un peu de piment au jeu, pour que l’audimat reste stable, pour que les gens continuent à nous regarder. Une troisième saison, après qu’une cohorte d’émissions de real-TV se soient bousculées pour se faire une place dans le PAF, il faut bien trouver de la nouveauté, sinon les spectateurs s’en vont.
Survivre. C’est de ça dont il a toujours été question, c’est ça que les spectateurs ont toujours voulu voir. Ce n’est pas les micro-sociétés, la bêtise humaine ou des histoires de cul sur petit écran. C’est voir des gens survivre, se battre pour subsister. C’est pour ça qu’on est payés. Seulement ils ont intérêt à avoir prévu une prime supplémentaire pour le gagnant, parce que ma « survie » vaut certainement quelques milliers d’euros de plus.

« Ce soir, c’est le Prime. L’un d’entre nous doit être éliminé par le public. Seulement comme notre public a perdu en cervelle ce qu’il a gagné en appétit, va falloir se débrouiller entre nous. »

          Les yeux bovins s’écarquillent. Un regard de vache étonnée en quelque sorte. Avec ce qui semble être une pointe d’effroi. Enfin on finit par s’intéresser à moi dans cette baraque.

« Ce que tu dis n’a pas de sens, me lance Michelle du haut de ses talons crottés de cervelle, tout est fini, le Prime, le jeu, l’Humanité, tout est terminé ! Il ne reste plus que nous ! Les caméras ne tournent plus, et si elles tournaient encore, les seuls êtres qui pourraient encore nous regarder sont morts ! Et toi tu nous parles de… de nominations ?!
- Les caméras marchent toujours. Et il y a toujours des gens qui regardent. Quoique disent les critiques, il y a toujours des gens qui regardent. C’est ce qu’ils demandent. Pourquoi crois-tu qu’ils sont tous autour du Loft, ce soir ? Ils sont venus acclamer leur idole, accueillir celui qui sortira ce soir. De toute façon, dehors c’est que du bonheur.
Le jeu est fait de cette façon, apparemment je suis le seul à avoir compris que c’est la nouvelle version de Loft Story : l’espace et la nourriture s’amenuisent jour après jour, et nous devons choisir qui restera et qui repartira dans la masse.
C’est simple. Il n’y a plus assez de nourriture pour 5 personnes. Si l’un d’entre nous ne part pas aujourd’hui, nous crèverons tous. Et ce n’est pas le but du jeu. Il faut un gagnant. Sinon tout l’argent investi dans ce jeu n’aura servi à rien.
- En gros tu veux qu’on choisisse lequel d’entre nous on va buter ? se hasarde Frank. T’es complètement pété, mon vieux, c’est quoi ton truc, un tribunal ? On risque déjà tous les jours de se faire bouffer si jamais ils détruisent les barricades, on va pas en plus se tuer entre nous ! »

          Des visages de vaches graves. Inexpressifs serait peut-être plus juste. Alors ils sont tous d’accord avec lui.
J’étais définitivement prédestiné à gagner, ils sont vraiment trop cons.
Qui a peur de perdre ? Qui a peur d’être éliminé par les autres concurrents ? Qui n’a pas réussi à se faire aimer, ni des spectateurs, ni de ses compagnons ?
Tout le monde veut être le leader ici. Ils n’acceptent simplement pas que ce soit moi. Seulement ils ont oublié que c’est aussi moi qui ai le flingue. C’est moi qui suis le leader.
Ils auraient préféré Jérôme, c’est sûr. Tout le monde appréciait Jérôme, c’était le leader tout désigné.
Seulement Jérôme est mort.
Seulement Jérôme ne savait pas que le recul d’un fusil à pompe pouvait vous briser l’épaule.
Seulement Jérôme n’avait pas un papa policier.
Et si je l’ai laissé derrière moi, c’est que sans aucun leader, le reste du groupe n’aurait pas survécu, ils avaient besoin de moi. Après tout, si Jérôme avait pu se faire aimer du public, ils l’auraient laissé en vie. C’est moi qui aie trouvé le poste de sécurité. C’est moi qui aie trouvé les armes. C’est moi qui aie explosé le crâne des zombies qui s’affairaient autour de Jérôme pendant que le reste du groupe se repliait. C’est moi qui aie achevé Lydie et Miguel quand ils ont rouvert les yeux. Alors Nom de Dieu ils peuvent quand même bien m’écouter et faire ce que je leur dis !

         Je pointe calmement le revolver. Écarquiller légèrement les yeux, faire briller cette petite intensité dans le regard qui vous fait paraître complètement taré. Ca marche toujours…

« Il faut un gagnant au bout du compte, et sincèrement ça m’énerverait assez de devoir gagner en trichant. Alors on va se rendre chacun son tour dans le confessionnal pour dire quels sont les nominés, et ensuite on verra. »

         Pourquoi est-ce que je lis une telle terreur dans leurs yeux ? Ils ont vraiment peur que ce soit moi qui gagne, ces enfoirés. Ils ont peur de n’avoir ni gloire, ni argent en sortant d’ici. Quand on a peur de ses concurrents, c’est déjà qu’on va perdre.


         Huitième jour.
Michelle a quitté le Loft hier.
Elle avait eu le plus grand nombre de voix aux nominations.
Pas étonnant, avec son air hautain et son élocution de bourgeoise, personne pouvait la blairer. Je crois que tout le monde l’a nominée (à part elle bien sûr). Forcément elle a très mal pris notre décision. Elle a même fait un scandale. Devant les caméras, en plein milieu du Prime. Ca a dû affoler l’audimat et la décrédibiliser définitivement aux yeux des spectateurs. J’ai dû la frapper pour la calmer, et Frank et moi l’avons jetée dehors.
Ils ont compris maintenant. Maintenant chacun espère être celui ou celle qui gagnera. Voilà ce que j’appelle l’esprit du jeu. 4 concurrents prêts à s’opposer sans coups bas, dans les règles. Liliane, Samantha, Frank et moi.
Je garde le flingue. Il n’y a que moi qui sache viser en cas d’attaque, et je ne voudrais pas qu’un mauvais joueur s’immisce une nouvelle fois dans le groupe. Ils ont confiance en moi, ils savent que je cèderais l’arme si j’étais désigné comme perdant. Mais au fond d’eux, ils savent aussi qu’ils n’ont pas l’ombre d’une chance. Je suis leur leader, tout le monde m’apprécie, il n’y a aucune raison pour que je parte.

          Les choses ont fini par reprendre leur cours normal. Liliane prépare à manger en repoussant les mouches que les cadavres ont attirées.
Bel effort. Je doute qu’elle soit nominée tout de suite.
Frank se lave dans l’eau de la piscine, qui continue à être automatiquement renouvelée. Seule Samantha reste prostrée avec un regard vide. Remarque, pas tellement plus vide que d’habitude. La seule différence étant qu’elle ne parle plus. Et ça, ça soulage. Peut-être que si je tente une approche, elle se laissera faire. Nous attendons que le prochain Prime arrive, chacun essayant de bien paraître aux yeux des autres. Pourtant je suis sûr que tout le monde sait que les jeux sont faits.

Nous devons en être au 22 ou 23ème jour maintenant, et il ne reste plus que moi.
Je savais bien que j’allais gagner.
Jusqu’à hier nous étions deux. Seulement Samantha a réussi à me voler le flingue pendant mon sommeil, et s’est tiré une balle dans la tête. D’ailleurs elle n’a pas très bien visé, je crois qu’à mon réveil elle vivait encore. Les femmes…
C’était un geste totalement inutile et idiot. Nous avions gagné. Le couple vainqueur de Loft Story 3. J’avais trouvé la fève, et j’avais choisi ma reine. Alors vraiment, je ne comprends pas.
On avait éliminé Liliane, qui en faisait trop seulement pour ne pas être éliminée, et Frank, qui avait essayé de la toucher. Evidemment, si elle dit rien, elle aussi… Maintenant je suis tout seul. Tant pis pour elle. Après tout, ça fera plus de succès pour moi, plus d’argent même, et je n’aurai pas à partager la villa à St-Tropez. Les caméras tournent toujours. J’ai appris à reconnaître leur bourdonnement. Quand il n’y a d’autres bruits que le râle lointain des morts-vivants et les gémissements des derniers participants, on finit par s’attarder sur les détails. J’espère que je passe bien à l’écran. J’ai fait ce que j’ai pu pour paraître présentable. À vrai dire je suis pas fâché de quitter le Loft. Avec l’odeur terrible des corps en décomposition et le peu de pièces qu’il nous restait, il y a de quoi devenir légèrement claustrophobe.

         Je les entends dehors. J’entends leurs cris. Ils m’acclament. Ils n’attendent que moi. Si je n’étais pas sûr que ces cadavres ambulants n’avaient pour autre langage que des gargouillis et des grognements, je jurerais les entendre scander mon nom. J’ai vécu quelque chose d’extraordinaire ici, je ne serai plus jamais comme eux. Dorénavant je serai au-dessus.
J’éteins la lumière, je ferme toutes les portes, j’enjambe la chose grouillante d’asticots qui fut Miguel, et je me dirige vers la porte d’entrée. Ils se rapprochent, derrière. Je les sens s’approcher. Ils savent que je suis là. Je pose la main sur la poignée. J’ai comme une légère appréhension. Ca fait plus d’un mois que je n’ai pas mis les pieds dehors, j’avais fini par m’habituer…
Je sais, c’est paradoxal, il n’y a aucune appréhension à avoir, je devrais même commencer à sentir un sourire monter sur mes lèvres. Après tout, dehors c’est que du bonheur.
J’ouvre la porte.

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