jeudi 25 août 2011

Terre et Mer [UnderConstruction]


   Du haut d’une falaise, une femme regardait un vieux bateau de pêche s’éloigner à l’horizon. Assise sur un rocher, sa longue chevelure rousse ondulant dans le vent, elle se tenait droite avec les bras croisés et le visage fermé.
   Quand le bateau disparut, elle se leva, tourna le dos à la mer et marcha vers la forêt sur le versant de la falaise. Le soleil se couchant, la pénombre s’installait au milieu des arbres. La douceur estivale et le parfum enivrant d’un soir d’été commençaient à envelopper le monde crépusculaire. Cependant, l’air marin dominait dans l’atmosphère et il attirait irrésistiblement la femme hors de la forêt.
  Quand elle fut sur la plage, tout en marchant sur le sable fin, le sentiment d’être abandonnée, qu’elle ressentait à chaque fois qu’elle revivait la disparition de son mari, se dissipa pour être remplacé par la joie d’être seule en intimité avec le monde.
  Soudain, quelque chose émergea de la mer à une vingtaine de mètres d’elle face au soleil couchant. Elle s’arrêta immédiatement et regarda, très attentivement, l’endroit où elle avait vu du mouvement. Au bout de quelques secondes, comme aucun phénomène similaire ne se reproduisait, elle décida de continuer son chemin. Cependant, après quelques pas, elle perçut le mouvement de la chose du coin de son œil gauche. Comme celle-ci disparut une nouvelle fois, la femme étendit son châle blanc sur le sable et s’assit dessus, attendant que le phénomène se reproduise.
  La mer est étrangement calme, presque plate et le vent est tombé, remarqua-t-elle.
  Ce fût comme si une sorte de rocher remontait à la surface. Sa couleur se situait entre le marron et le cuivré. La chose, dans cette mer sans vague, flotta un instant sans le moindre mouvement avant que des yeux émergent ainsi que le reste du visage de la créature. C’était une chimère dont le visage était à mi-chemin de l’humain et du poulpe.
  Depuis l’endroit où il se trouvait, il contempla brièvement et intensément la femme. Il voyait sa blancheur rayonner sur cette plage obscure qu’il avait jadis foulée du pied. Sa lumière éblouissait les environs sur une grande distance. Sa puissance était telle qu’elle lui frappa le cœur, à travers l’obscurité des fonds marins, alors qu’il dormait d’un sommeil éternel dans sa maison de fer.
  Le haut d’un buste d’homme apparut hors de l’eau ainsi que d’immenses tentacules - dont deux possédaient des mains humaines aux extrémités. La chimère continuait à se rapprocher en direction de la lumière avec lenteur.
  Dans le même temps, la lumière du soleil sembla s’être figée à l’ouest et les étoiles commençaient à sortir de la couverture, d’un bleu sombre, du ciel crépusculaire. Aucun son ne s’entendit, un calme plat régna dans les environs. L’atmosphère sembla artificielle, irréelle, comme suspendue.
  La femme sur la plage contemplait la créature s’avancer progressivement vers elle et se mouvoir de manière étrange. Ses nombreux tentacules commencèrent alors à produire des gestes complexes comme s’il s’agissait d’une danse. Cette danse, qui devenait de plus en plus frénétique, déclencha des vagues d’ivresse chez tous les êtres qui pouvaient la voir. Ainsi, dès son commencement, il y eut une explosion sonore : les arbres s’agitèrent dans tous les sens, les oiseaux piaillèrent de tous les côtés ; puis, des baleines poussèrent des cris et sautèrent hors de l’eau ainsi que des dauphins ; enfin, dans la forêt, des loups hurlèrent en même temps que des cerfs bramèrent.
  Des larmes de joie coulèrent des yeux de la femme. Elle savait que c’était un présent à son intention. Elle croyait reconnaître la créature en face d’elle. Il s’agissait de son défunt mari qui revenait d’entre les morts transformé en créature marine !
  Ce qui avait été autrefois un homme, finit par sortir de l’eau, il était immense et ne possédait pas de jambes. Il se trouva à moins de deux mètres face à elle. Il la contempla comme s’il s’agissait d’une vision éphémère qu’il voulait graver dans sa mémoire à tout jamais. Pour lui, il s’agissait d’une déesse de la Nature. Pourtant, à travers sa lumière, il semblait distinguer une forme qu’il avait connue un jour, mais il lui était impossible de se rappeler où et quand.
  Après l’avoir examiné avec attention, il constata que la source de sa lumière était comme bridée sous plusieurs fines couches. Néanmoins, il ne savait pas ce qu’elles étaient.
  Son appétence grandit à la vue de la source, il tenait sa chance, celle qu’il avait attendue depuis tant de temps, celle qui lui permettrait de redevenir ce qu’il avait été quand il fut le premier de tous les êtres !
  Lentement, la créature commença à avancer un de ses tentacules-main vers la femme et il rencontra sa main gauche posée sur le sable. Ensuite, il remonta le long de son bras vers sa nuque. De même, qu’un second tentacule-main gravit simultanément son bras opposé.    
  Ensemble, ils défirent le nœud qui tenait le haut de la robe blanche. Elle, toujours assise, vit le haut de sa robe glisser jusqu'à sa taille et ses seins jaillir divinement. Dans un même temps, deux nouveaux tentacules, dépourvus de mains cette fois-ci, longèrent les jambes et retirèrent délicatement la culotte et la robe ensemble pendant que les tentacules-main la firent s’allonger sur le sable tiède en la poussant doucement par les épaules. Ensuite, toujours lentement, les tentacules-mains frôlèrent ses tétons durs en descendant le long de son buste et écartèrent ses jambes.
  Le poulpe contempla la vulve rose couverte d’une abondante toison blond vénitien. Toutefois, il ne voyait que la source de la lumière de la déesse enfin libre. Elle était enfin à sa portée !
  Brusquement, avec une énergie sauvage, il se jeta sur la femme et colla sa bouche à sa vulve. Elle se mit à gémir et son rythme cardiaque s’accéléra. Des tentacules se mirent à lui masser ses seins, pendant qu’un des tentacules-mains pénétrait son vagin. Son plaisir semblait gonfler au fil des secondes. Des ondes de frissons parcoururent la totalité de son corps. Elle se mit à briller avec l’intensité du soleil à midi.
  Autour d’eux, le monde marin s’unit avec le monde terrestre par les éléments : le vent marin secoua les arbres dans tous les sens et les vagues se jetèrent de toute leur force contre les falaises. Dans cette tempête sauvage, les éléments marins et terrestres ne firent qu’un.
  Un cri de bonheur retentit tel le tonnerre. Le vent s’arrêta brusquement de souffler, la mer redevint instantanément plate. Le soleil terminait sa course derrière l’horizon et la lune projetait sa lumière pâle et apaisante sur un monde soulagé.
  L’homme-poulpe avait lancé ce bref et fort cri de victoire. De son côté, la Déesse avait poussé un profond et long soupir. Ses muscles se contractaient encore spasmodiquement tandis que celui-ci se retira rapidement, les tentacules-mains joints et luminescents.
  Quand il ouvrit les mains, il vit une petite chose ronde briller d’une lumière blanche. Après l’avoir contemplé quelques secondes, il avala la chose sans cérémonie et disparut sur-le-champ.
  De son côté, la Déesse toute de lumière devint terne. Elle se trouvait entre la vie et la mort à visiter d’étranges royaumes et à choisir si elle allait continuer son chemin dans ces royaumes ou revenir à l’endroit où elle avait toujours été.
  Comme la marée monta, les vagues l’entraînèrent dans l’eau. Elles la portèrent au sommet de l’océan et la bercèrent avant de la redéposer sur la plage. Elle recommençait à luire faiblement dans l’obscurité.
  Soudain, plusieurs vagues la submergèrent, elle se réveilla en sursaut. Elle s’assit et regarda autour d’elle. Elle constata qu’elle se trouvait dans son lit, dans sa chambre. Elle porta ensuite un regard sur ses mains et ses bras, ils étaient couverts de sueur, tout comme son lit et ses draps étaient trempés. Enfin, elle était nue alors qu’elle était sûre d’avoir mit une nuisette avant d’aller se coucher.
  Des traces humides se trouvaient sur le sol en bois de sa chambre et provenaient de la fenêtre ouverte sur sa droite.  « Le Dieu de la mer m’a réellement visitée cette nuit ! » pensa-t-elle. Dans son excitation, elle le hurla en sautant hors de son lit. Ensuite, elle sortit de sa chambre et dévala les escaliers avant de foncer dehors, vers la plage.
  C’était l’aube. Elle entendait les vagues se fracasser contre les falaises. Quelques cirrus matinaux se tenaient immobiles dans le ciel au-dessus de la plage. Les oiseaux étaient déjà bruyants dans la forêt.
  Elle préféra couper par un champ de hautes herbes couvert de rosée que de rejoindre la plage par le petit chemin qui traverse la forêt. Elle courut à en perdre haleine sous les premiers rayons du soleil matinal. Des petits oiseaux se mirent à tourner à quelques mètres au-dessus d’elle et la suivirent en piaillant gaiment.
  Une légère brise marine se leva et lui rappela sa nudité ainsi que la fraîcheur matinale. Par chance, des vêtements se trouvaient non loin. Elle découvrit une culotte, une robe et un châle blanc. Il s’agissait des vêtements qu’elle portait dans son rêve, ceux que portait la Déesse de la Nature. Elle les ramassa avec soin et elle s’en vêtit. Elle était la Déesse maintenant ! 

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